Ecrire.
Ecrire son regard, écrire ses lèvres, écrire son silence et son cul lorsqu’elle s’est tournée, écrire son front contre la porte d’entrée, écrire mon doigt dans sa chatte, écrire son ventre brulant, écrire sa chaleur liquide et son tout premier gémissement. Pourquoi me donne-t-elle envie d’écrire presque autant que de la baiser ? Pourquoi cette pulsion, cette jouissance qui gronde en moi lorsque j’écris ?
Je ne l’oublierai pas, non. J’ai encore en mémoire notre première fois, il y a deux ans, puis le one-shot de l’année dernière. Elle a disparue deux fois, puis est revenue. Pourquoi ? Je n’en sais rien, et puis en quoi ça me concerne puisqu’elle était là cette nuit ? Elle avait ses raisons. Moi, j’ai encore en mémoire, intact, et parmi mille autres détails de ces deux premières fois, le bruit des impacts du martinet. Elle, provocante et dos tourné, me demandait toujours plus, et moi j’y allais comme un sourd, à me déglinguer le bras.
Mais des branlées, des bonnes parties de cul rouge et de baise, j’en ai déjà mis à d’autres. Alors pourquoi elle ? Inexplicable. Et d’ailleurs je ne veux rien savoir. Qu’on me lâche avec les phéromones, l’instinct de reproduction et tout le bazar scientofuck. Le sexe n’est pas que chimie.
Cette fille me fait grimper aux rideaux, c’est le seul fait tangible de cette histoire, le seul truc qui me donne envie de gicler ces mots.
Ecrire son jean baissé à mi-cuisse. Ecrire la ceinture que je serre autour, juste sous sa chatte, écrire son hoquet – je l’avais pourtant avertie que je ne découvrirai que son cul avant de la baiser. Ecrire ses tout petits pas hauts perchés pour l’aller jusqu’au buffet, cuisses entravées. Ecrire ses yeux immenses, son dernier regard avant de se pencher dessus, écrire son envie d’en prendre, écrire ses SMS de la veille qui me reviennent alors « fais moi mal … ça me reprend … trop longtemps sans rien ».
Ecrire au ralenti, écrire chaque détail de son corps qui s’allonge et qui s’offre, écrire ses poignets que j’attache aux pieds du buffet. Et puis, pressé comme je suis, la galère pour glisser un coussin sous elle. J’allais la baiser, j’allais la bourrer même – trop d’envie contenue – et l’arrête du buffet allait sans doute lui faire mal. Je la soulève d’un bras, ses pieds décollent, je passe le coussin, je la repose, vérifie que mon sexe est à bonne hauteur. Je baisse mon fut’, prend une capote et l’empale.
Putain, comment écrire ça ? Elle pleure. Dès les premières secondes elle pleure, ou plutôt non, elle supplie. Cela ne fait pas cinq minutes qu’elle est entrée chez moi et elle supplie déjà, elle en reveut avant même d’en avoir. Ses bras, même attachés, se vrillent dans tous les sens. La lampe bringueballe sur le buffet, menaçant de tomber. Je m’arrête, me dégonde, vire la lampe puis y retourne.
Oui vas-y, écris l’écrivain. Écris ces mots qui n’existent pas : chatte, cris, bite, claques, ongles dans sa peau, cheveux tirés. Écris tous ces mots d’avant, et vois quels sens ils prennent aujourd’hui que tu repenses à elle. Et d’ailleurs, tu le savais déjà, dès les premiers coups de bite, que quelque chose se passait, et qu’il faudrait que tu l’écrives.
Alors voilà j’écris.
J’écris que c’était hier, que nous sommes aujourd’hui, et qu’elle revient demain.
Il me reste toute la journée pour me branler la suite sans fin dans ma tête, me remémorer ce qui s’est passé.
Mais aujourd’hui, je veux déjà écrire les dernières secondes du petit matin, il y a deux heures, le dernier bécot lorsqu’elle est partie, écrire les petites taches de sang lorsque j’ai changé les draps. « Merde, j’y suis allé trop fort ». Ecrire que j’ai alors pensé à sa chatte sous son jean, sans culotte toute la journée, et aux taches qu’elle verra sans doute ce soir.
Alors m’est venu le titre de cette confession : « BLOOD, Sex and Tears ».
Et ça m’a fait sourire …
… car c’est de mon sang qu’il s’agit, de celui qui bout en moi en attendant la suite. Je ne veux pas, je ne peux pas redescendre.
Putains d’endorphines !
D’Ange, Heureux Camé